31 mars 2007

La campagne vue d'Allemagne

Bonjour à tous,

Tout le monde est en campagne, la France est en campagne. Pour tout vous dire, cette campagne est fatigante, elle sombre même dans le ridicule, tant certains des acteurs semblent ravis d’escamoter le débat.

Je tente de passer en revue les événements passés des derniers jours sous le prisme d’un français vivant en Allemagne.

Je traiterai des points suivants :

1) identité nationale et drapeau : comparaison franco-allemande

2) sécurité, insécurité : comment mettre en relief les événements de la Gare du Nord ?

3) lettre ouverte à Mazarine : qui est cette gauche qui va voter pour Bayrou ?

1) Un nouveau thème de campagne est apparu aux couleurs bleu-blanc-rouge. On dirait que la célébration du drapeau et de la Marseillaise semblent être des thèmes essentiels dans la France actuelle. Que l’identité nationale ne doit pas être menacée.

Alors, chers tous, réfléchissons ensemble à ceci : si le gouvernement allemand avait déclaré vouloir créer un ministère de l’immigration et de l’identité nationale, si la chancelière avait exigé que chaque allemand ait un drapeau chez lui, si on avait dit en Allemagne qu’il fallait réunir social et national, comment aurait-on réagi en France et en Europe ? Et oui, ca fait drôle et c’est ce qu’il se passe. En France. Nous avons peur. De nous, avant tout.

Tout cela m’a inspiré la réflexion suivante : j’ai un drapeau français chez moi, je connais la Marseillaise par coeur (les 3 couplets), je me sens français et fier de l’être. D’un autre côté, quand je vois ce qu’il se passe en France ces derniers temps, ma fierté s’écorne un brin, car il n’y a quasiment plus de domaine où la France peut se montrer en exemple (merci Laure Manaudou quand même).

Un ami m’écrivait qu’il commençait à développer les mêmes sentiments vis-à-vis de la France que sa femme vis-à-vis de son pays (la Pologne). Sentiments très négatifs. Renforcé par les événements Gare du Nord.

Les allemands ont, du fait de leur histoire, une relation toute particulière à la Nation. Ce n’est pas ca qu’il ne l’aime pas, ce n’est pas pour ca qu’ils ne s’aiment pas. Nous l’avons vu pendant le Mondial de foot et cette frénésie aux couleurs de ce pays. Frénésie teintée de tolérance et de respect, d’ouverture aux autres, là où nous français préférons nous replier sur notre pré carré. Cette campagne est symptomatique de ce repli identitaire des français. Les politiques classiques de l’UMP et du PS essayent de coller aux sentiments des français en rejoignant Le Pen sur nombre de ses idées plutôt que d’essayer de montrer une vision au pays. D’être visionnaire, c’est avant tout le rôle du politique.

Je suis attristé et néanmoins soulagé ces temps-ci. Attristé de plus en plus par ce sentiment d’amertume face à cette France. Soulagé parce que dès l’année prochaine j’aurais le droit à la double nationalité franco-allemande.


2) Chacun a pu voir ce qu’il s’est passé Gare du Nord. Un individu, présenté très vite par le Ministre de l’Intérieur démissionnaire comme un multirécidiviste sans papiers, justifiant en cela implicitement les violences exercées a posteriori, a fait preuve d’un comportement extrêmement dangereux et condamnable. Outre qu’il ait fraudé le métro, ce qui est répréhensible, il a frappé un agent de la RATP, ce qui est condamnable et mérite sanction. Le fait qu’ensuite il y ait eu émeute avec nombre de citoyens ordinaires, simples passants et cols blancs y prenant part, est un symptôme grave de la situation dans laquelle est la société française : nul ne respecte les forces de l’ordre qui sont vues comme une menace plutôt qu’une protection. Car si la police doit protéger la population, pourquoi nombre des voyageurs présents se sont rangé du côté des émeutiers ?

Ce n’est pas qu’un problème de sécurité, c’est un problème de société. Ce qui s’est passé est inquiétant. Il ne faut dédouaner personne de ses responsabilités.

Or, suite à cet incident, nous avons eu droit aux discours pathétiques des uns et des autres, l’un parlant de tout répressif en accusant une minorité, l’autre d’ordre juste sans que personne ne puisse définir ce mot. La gauche a longtemps ignoré et continue, pour une partie d’entre elle (qui aspire à gouverner), à ignorer les problèmes des banlieues en allant jusqu’à tout excuser (excuser les jeunes de casser, frauder, voler) ; la droite a nié et nie toujours voir dans ces problèmes ceux de la société dans son ensemble, en traitant chaque individu comme une exception, et ainsi en ne jugeant pas nécessaire par exemple d’investir dans ces quartiers sensibles, sauf par une présence répressive accrue. Luc Ferry, sur LCI, dans un mot au cynisme méprisant, a voulu ridiculiser la police de proximité en ce sens : “ce n’est pas en donnant une activité culturelle à ce multirécidiviste qu’on arrangera sa situation”. La police et l’autorité ont perdu beaucoup de leur crédit et ne sont plus respectés, dans les banlieues comme ailleurs. C’est un fait.

Je vous invite à voir cette vidéo qui, si elle est orientée, n’en dépeint pas moins la situation http://www.dailymotion.com/video/x72d4_le-vrai-sarkozy

Cette situation est intenable et dangereuse. Nous devons croire en nos forces de maintien de l’ordre et de la sécurité. Il est grand temps que tout le monde se retrousse les manches et travaille ensemble à la résolution du problème. C’est un problème très lourd, qui implique la cohésion nationale. Nul doute que la guéguerre gauche droite ne résolvera pas la situation facilement et renforcera les extrêmes. Francfort, qui était très criminalisé il y a 10 ans, a gagné en sécurité au bénéfice d’une coalition socialistes-conservateurs-écolos-libéraux qui a travaillé ensemble à la résolution des problèmes, face à une extrême droite à l’époque puissante.

Une mise en commun de toutes les bonnes volontés. C’est exactement le message du candidat Bayrou.

3)A propos de Bayrou, nous observons, en dépit de sondages plutôt défavorables (le Canard Enchaîné a mis à clair les méthodes de ces derniers instituts et le constat est si édifiant que leur crédibilité, si elle n’était pas déjà entachée, risque de s’effondrer), une migration continue de gens déçus par le Parti Socialiste vers François Bayrou. Ces électeurs se font insulter par voie de presse comme n’ayant rien compris, comme les tenants du Non au referendum se faisaient insulter de la même façon avant le 29 mais 2005.

Pour en comprendre la raison, j’ai trouvé ce texte résumé d’un lecteur de www.bayrou.fr, dans le cadre d’une lettre à Mazarine.

Chère Mazarine. Hier dans le Parisien, vous dites ne pas comprendre pourquoi des gens de gauche veulent votre F.Bayrou. "Je ne me l'explique pas" ajoutez-vous.

Chère Mazarine. Avez-vous cherché à comprendre, à entendre, simplement à écouter ? Notre parole a de la force, car elle vient de loin. Notre volonté est tranquille, car elle est répond aux besoins du moment.

Chère Mazarine, nous avons voté pour votre père en 1981. Nous en avions assez qu'une "France de droite" ne respecte pas une "France de gauche" et lui déniait la capacité d'exercer des responsabilités. Nous avons acquis le sens des responsabilités, avec Jacques Delors. Oui, nous avons accepté d'entreprendre des modernisations industrielles parce que nous les savions nécessaires. Cela a commencé à dérailler. Pourquoi maintenir un discours formel de lutte de classe, de rupture avec le capitalisme, alors que, les mains dans le cambouis, nous découvrions les contraintes d'un pays réel.

En 1988, nous avons voté pour votre père, parce que le Chirac ultralibéral de 1986 (un sarko d'aujourd'hui) ne pouvait diriger le pays. Nous avons voté pour votre père qui pourtant nous suggérait le "ni-ni". Il a gagné, haut la main. Il a ensuite réalisé une micro ouverture surtout pour y piéger Rocard; son ennemi. Nous avons mal vécu pendant 7 ans.

En 1995, nous avons suivi de loin une campagne qui nous concernait de moins en moins. En 1997, nous avons voté mécaniquement. Jospin fut élu par surprise. Il a bien agi avec DSK pour relancer l'économie. Mais, avons-nous osé traiter les sujets d'avenir : celui des retraites par exemple. 10 ans après Rocard, nous avons évité ce sujet qui fâche.

En 2002, la gauche a perdu. En 2004, malheureusement elle a gagné haut la main. En 2005, elle a gâché l'Europe. Trop couarde ou trop suffisante pour affronter sa gauche irresponsable.

Et voilà, que par un tour de marketing politique magnifique, la gauche nous offre un nouveau produit, un Royal positionnement. Le discours est vide, seul reste l'amour du pouvoir. Jamais de remise en cause : cette gauche de gouvernement ne s'est jamais interrogée. En 1983, s'ouvrait la parenthèse de la rigueur. Ce fut un acte politique courageux, votre père y a souscrit. Mais jamais, nous n'avons voulu assumer cette évolution de notre pensée. Nous avons changé, sans le reconnaître, sans dire pourquoi, sans expliquer. Que votre père ait voulu, par réalisme, faire des concessions idéologiques au parti communiste, on peut et on doit l'accepter.

Mais 30 ans plus tard ? Pourquoi ne pas assumer un peu de cohérence, entre la pensée, l'analyse du réel et les actes. Entre le dire et le faire. En rejoignant François Bayrou, nous sommes forts et tranquilles car nous sommes fidèles à un moment fort de la gauche, celui de la vérité de Delors, assumé (volontaire ou contraint) par votre père. Il a fallu à l'époque du courage et de la lucidité pour casser l'inflation, fermer les mines après les avoir relancées.

Quelques-uns en ont eu. L'un d'entre eux s'appelait Peyrelevade. Il est au côté de François Bayrou. Vous devriez chercher à comprendre, la fidélité à un moment de vie de votre père n'est pas chez ceux que l'on croit.

Sur ces derniers mots, je vous invite à la réflexion personnelle. Seule celle-ci peut permettre la recherche de solution.

C’est pour cela que j’ai rejoint François Bayrou. Parce qu’il permet à la réflexion de prendre le dessus sur la passion.

Pour ceux qui doutaient que Bayrou ait un projet (c’est pas mal martelé ces temps-ci), on le trouve en première page de www.bayrou.fr :

http://www.bayrou.fr/telechargement/invitations/tract_8pages_bayrou.pdf

Bernard Poignant, maire (PS) de Quimper, a dit : « Sarkozy fait peur car on sait ce qu’il va faire [cf. vidéo ci-dessus], Royal fait peur car on ne sait pas ce qu’elle va faire, Bayrou fait peur car on ne sait pas comment [avec qui] il va faire ». J’avoue que ce dernier risque est bien moindre. S’il est élu, il se trouvera suffisamment de monde pour soutenir sa démarche. Des signes de ralliement à droite, de critiques de moins en moins feutrées de la candidate socialiste à gauche, sont des éléments tangibles de ralliements futurs.

Réunir, rassembler, unir, plutôt que diviser, ostraciser, ruiner, telle est la démarche de Francois Bayrou.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

En France on parle de l identite nationale, en Allemagne de Deutsche Leitkultur > http://www.tagesschau.de/aktuell/meldungen/0,1185,OID6449880,00.html... C est en gros la meme chose: la negation des nouveaux droits de citoyens europeens provenant de la Charte des Droits Fondamentaux > www.chartaland.de et la regression nationaliste.

Ce n est pas mieux en Allemagne qu en France.

C est la raison pour laquelle je voterai BAYROU.